Décryptage: l’ordonnance 2020-306 et le délai de recours des tiers contre les permis de construire

L'ordonnance 2020-306 rallonge le délai de recours des tiers applicable aux autorisations d’urbanisme telles que permis de construire, déclarations préalables, permis de démolir ou permis d’aménager. Ce délai est interrompu rétroactivement depuis le 12 mars 2020 par l’entrée en vigueur de la loi d’urgence sanitaire (loi n°2020-290 du 23 mars 2020) pour faire face à l’épidémie de coronavirus Covid-19.

[Mise à jour du 17 avril 2020] : Les dispositions de l'ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 ont été modifiées par l'ordonnance n°2020-427 du 15 avril >>LIEN>>

Cette loi a permis au Président de la République de prendre sur proposition du Gouvernement de multiples ordonnances pour détailler une vaste gamme de mesures. L'ordonnance 2020-306 proposée par la Ministre de la Justice, prise par le Président le 25 mars et publiée au Journal Officiel le 26 mars aménage profondément tous les délais en matière de justice, notamment le délai de recours des tiers. 

Cet article s’inscrit dans la continuité de notre article précédent “Faut-il afficher les permis de construire pendant le Covid-19?” qui pré-datait la publication des ordonnances. [Mise à jour du 17 avril 2020: une nouvelle ordonnance vient tout modifier à nouveau en matière de délais]

Rappel : les délais de recours des tiers contre les permis de construire en temps “normal”

L’article R424-15 du code de l’urbanisme définit les conditions de bonne information des tiers quant à la publicité à donner aux autorisations d’urbanisme. Il prévoit notamment l’affichage d’un panneau de dimensions supérieures à 80cm sur le terrain, lisible et visible depuis la voie publique.

délai de recours contre les permis de construire

Cet affichage fait démarrer le délai de recours des tiers institué par l’article R600-2 à partir du premier jour d’une période continue d’affichage sur le terrain de ce panneau. Afin de garantir cette continuité, Attestis a développé plusieurs innovations brevetées utilisant les technologies Blockchain et Internet des Objets.

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L’article R600-1 encadre quant à lui les conditions dans lesquelles un tiers ayant engagé une procédure contentieuse devant le Tribunal Administratif doit en notifier le maître d’ouvrage et le service instructeur. L'article R600-1 s'applique aussi à la notification des recours intentés par le préfet ("déféré préfectoral"). La notification prévue dans cet article doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du recours. (Nous ne rentrerons pas ici par souci de simplicité dans le distingo à faire entre jours “calendaires” et jours “francs”, ni dans les notions de “dies a quo” / “dies ad quem” qui feront l’objet d’un futur article). Dans les faits, ce délai de notification de 15 jours francs s’ajoute au délai de recours pour déterminer à quelle date les recours peuvent être considérés comme “purgés”.

En outre, deux autres délais courent en parallèle du délai de recours des tiers: le délai de déféré préfectoral (article L2131-6 du code général des collectivités territoriales) et le délai de retrait (article L424-5 du code de l’urbanisme). 

Le délai de retrait permet à l’autorité ayant délivré le permis (en général la mairie) de prendre une décision individuelle pour retirer cette autorisation si elle l’estime entachée d’illégalité (notamment pour les autorisations tacites). Le point de départ du délai de retrait est la date de l’arrêté donnant l’autorisation (“date d’octroi”). Le délai de retrait est de 3 mois (francs).

Le délai de déféré préfectoral permet au représentant de l'Etat compétent (en général le préfet) d'intenter un recours au Tribunal Administratif contre une autorisation s'il estime la décision du maire illégale. Le point de départ du délai de déféré préfectoral est la date de transmission par l'autorité administrative (la mairie). Cette transmission doit être réalisée sous 15 jours francs (article L2131-1 du code général des collectivités territoriales). Le délai de déféré du préfet est alors de deux mois à compter de cette transmission, et il doit être notifié par LRAR dans les mêmes conditions que le délai de recours des tiers. Cette notification rajoute donc un délai de 15 jours (art. R600-1 c. urba).

En temps normal le délai de retrait et le délai de déféré préfectoral ont la même durée, une fois rajoutés à ce dernier les délais de transmission et de notification. Les nouvelles ordonnances viennent bouleverser ce séquencement normal.

La “purge” de ces trois délais (délai de recours, délai de déféré préfectoral, délai de retrait - augmentés le cas échéant des délais de transmission ou notification applicables) confère un caractère certain à une autorisation d'urbanisme. Ce caractère certain est un préalable à la sécurité juridique d’un projet de construction et au déroulement des étapes suivantes d’une opération. Plus particulièrement, l’acte notarié d’achat du terrain est systématiquement assorti d’une condition suspensive de purge des recours. Il en va de même de l’accord de la Garantie Financière d’Achèvement (GFA) pour la promotion immobilière en VEFA, du déblocage de financements en fonds propres ou des appels de fonds pour les prêts. 

Un recours tardif jugé recevable par le Tribunal Administratif peut mettre en péril le calendrier et l’équilibre financier d’un programme. Tous les promoteurs attendent la purge des recours pour engager la réalisation de leurs programmes. Les ordonnances prises par le gouvernement face à l'épidémie de coronavirus Covid-19 revêtent donc une importance stratégique pour toute la filière immobilier / construction.

Ces délais, notamment le délai de recours des tiers, sont interrompus rétroactivement à la date du 12 mars 2020 par les ordonnances 2020-305 et 2020-306 publiées le 26 mars 2020.

MISES A JOUR du 17 avril 2020 et 8 mai 2020: Les dispositions de l'ordonnance 2020-306 du 25 mars ont été modifiées par l'ordonnance 2020-427 du 15 avril. Les délais, notamment le délai de recours des tiers contre les permis de construire, sont désormais suspendus, c'est à dire qu'il reprennent pour leur durée restante dès la fin de l'urgence sanitaire le 24 mai (mis à jour le 8 mai).

Impact de l’ordonnance 2020-306 sur le délai de purge des recours selon leurs dates d’affichage

L’effet des dispositions de l’ordonnance 2020-306 est de rallonger très significativement la purge du délai de recours (et des autres délais) pour toutes les autorisations octroyées depuis fin décembre 2019, dont certaines auraient pu être considérées comme déjà purgées de tout recours. La purge du délai de recours des tiers peut ainsi être rallongée à plus de 8 mois. 

Paradoxalement, les autorisations d'urbanisme qui seront affichées à la fin de la période d’urgence ne seront -elles- pas concernées puisque leurs délais de recours expireront après la fin de la "période juridiquement protégée" définie à l’article 1 de l’ordonnance 2020-306. [Mise à jour du 17 avril 2020] Cet effet a été annulé par la nouvelle ordonnance.

Pour analyser l’impact de l’ordonnance sur les délais, il faut considérer 3 cas distincts selon la date à laquelle le permis de construire (ou autre autorisation d’urbanisme) a été octroyé et affiché:

  1. permis de construire affichés avant le 12/03/2020

  2. permis de construire affichés entre le 12/03 et le 24/04/2020

  3. permis de construire affichés après le 24/04/2020

Les diagrammes ci-dessous permettent d’apprécier chacun des cas:

1) Cas des permis de construire affichés avant le 12/03/2020 

L’impact de l’ordonnance 2020-306 sur le délai de recours est le plus significatif sur les autorisations pour lesquelles le délai de recours de l’article R600-2 (éventuellement rallongé du délai de notification de l’article R600-1) expire au début de la période d’urgence sanitaire telle que définie ci-dessus

Ordonnance 2020-306 et délai de recours sur les permis de construire - cas des permis affichés avant le 12 mars 2020

Dans le cas d’un permis de construire octroyé par exemple le 10 janvier et affiché  le 13 janvier 2020, le délai de recours des tiers qui arrivait presque à sa fin se trouve rétroactivement interrompu au 12/03 par l'ordonnance 2020-306, et repart à zéro le 24/06 pour être purgé à l’issue du délai de notification le 09/09, soit près de 9 mois de délai (au lieu de 2 et demi) pendant lesquels l’opération ne peut pas démarrer (!). [Mise à jour du 17 avril 2020] Cette "remise à zéro" a été annulée par la nouvelle ordonnance.


Il est intéressant de noter que dans ce cas, le délai de retrait ne redémarre pas pour 3 mois à partir du 24/06. En effet l'article 7 de l’ordonnance 2020-306 prévoit une suspension pour les décisions de l'administration. Fait surprenant, le délai de retrait expire dans ce cas avant le délai de recours des tiers (re !). 

[Mise à jour du 26 avril 2020] La nouvelle ordonnance ne change rien au délai de retrait.

[Mise à jour du 8 mai 2020] Une troisième ordonnance soumet le délai de retrait au régime de suspension des délais de recours et déféré.


2) Cas des permis de construire affichés entre le 12/03 et le 24/04/2020

L’impact de l'ordonnance 2020-306 sur le délai de recours des autorisations octroyées et affichées au début de la période d’urgence sanitaire est plus prévisible et conforme au but recherché : gérer le ralentissement dans le fonctionnement des juridictions qui auraient pu être saisies de recours et sécuriser les contentieux.

Ordonnance 2020-306 et délai de recours sur les permis de construire - cas des permis affichés après le 12 mars 2020

Dans le cas d’un permis de construire octroyé et affiché par exemple aujourd’hui 30 mars 2020, le délai de recours des tiers ne commencera à courir qu’à l’issue de la période juridiquement protégée instituée par l'ordonnance 2020-306, soit le 24 juin. Le délai de recours des tiers sera purgé à la même date que dans le cas précédent, le 9 septembre. Encombrements à prévoir …


[Mise à jour du 26 avril 2020 - correction sur le délai de retrait] Concernant le délai de retrait: l'article 7 prévoit que "Le point de départ des délais de même nature qui auraient dû commencer à courir pendant la période mentionnée au I de l'article 1er est reporté jusqu'à l'achèvement de celle-ci." 

Le délai de retrait est donc ici reporté pour expirer au 25 septembre. Ce point n'est malheureusement pas modifié par l'ordonnance 2020-427 du 15 avril.


[Mise à jour du 8 mai 2020] Suite à l'ordonnance 2020-539 du 7 mai, le délai de retrait est désormais aligné sur les dates de suspension/report des autres délais: suspension entre 12 mars et le 23 mai 

 

3) Cas des permis de construire affichés après le 24/04/2020

Le dernier cas est le plus paradoxal: le moratoire sur le délai de recours institué par l’ordonnance 2020-306 n’aura -en l’état- aucun impact sur le délai de recours des tiers pour les autorisations octroyées et affichées moins de deux mois avant la fin de la période d’urgence sanitaire.

Ordonnance 2020-306 et délai de recours sur les permis de construire - cas des permis affichés après le 24 avril 2020

En effet, dans le cas d’une autorisation affichée par exemple le 27 avril 2020, le délai de recours des tiers expirera le 29 juin, soit au-delà de la date de fin de lapériode juridiquement protégée et ne sera donc pas rallongé. Si on y ajoute le délai de notification, le délai de recours des tiers sera donc purgé le 15/07/2020, soit presque 2 mois avant une autorisation qui aurait été accordée 4 mois plus tôt (cas 1 ci-dessus).


Cet “effet de bord” des dispositions de l’article 2 de l’ordonnance 2020-306 pourrait pousser certains maîtres d’ouvrage à retarder leurs affichages de permis de construire, permis d’aménager ou permis de démolir (et leurs modificatifs, prorogations, transferts…). Cette stratégie s’avère cependant très risquée. 


Tout d’abord le code de l’urbanisme prévoit d’afficher le panneau réglementaire “dès la notification de l’arrêté”. Toutefois, le code de l'urbanisme ne prévoit pas de sanction pour défaut d’affichage. La contravention de 5ème classe qui sanctionnait ce délit a été supprimée depuis plusieurs années. Et un des effet de l'ordonnance 2020-306 est justement de différer le caractère tardif de cette obligation.


[Mise à jour du 17 avril 2020] Cet effet d'aubaine potentiel a été supprimé par l'ordonnance 2020-427 du 15 avril. qui instaure une suspension des délais de recours et déféré préfectoral nés pendant la période d'état d'urgence sanitaire entre le 12 mars et le 24 mai.


[Mise à jour du 26 avril 2020] Ensuite, comme dans le cas précédent, le délai de retrait qui commence pendant la période juridiquement protégée entre le 12 mars et le 24 juin à 0h reste -lui- reporté jusqu'au 25 septembre. Sachant que l'autorisation n'est pas certaine avant la purge de ce délai, afficher dès le 24 avril n'aurait pas présenté d'intérêt.


Enfin et surtout, nul ne sait encore comment l’épidémie va évoluer. La loi d’habilitation du 23 mars instituant l’état d’urgence sanitaire prévoit la possibilité pour le gouvernement d’en prolonger la durée par la loi (ou la raccourcir par décret).


[Mise à jour du 8 mai 2020] L'ordonnance numéro 2020-539 prise le 7 mai donne désormais un terme fixe à la suspension des délais afin d'éviter un prolongement mécanique suite à la prorogation de l'état d'urgence jusqu'au 10 juillet. Avec cette 3ème ordonnance, les délais reprennent désormais leur cours le 24 mai à 0h.


Pour les juristes: que disent les ordonnances sur le délai de recours des tiers ?

Concernant le délai de recours des tiers, l’ordonnance 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif précise à l’article 15 de son Titre 1er que les dispositions de l’article 2 de l’ordonnance 2020-306 sont applicables à toutes les procédures devant les juridictions de l’ordre administratif: Tribunaux Administratifs (TA), Cours Administratives d’Appel (CAA), Conseil d’Etat (CE), ainsi que les autres juridictions administratives (JA). 


Les recours devant ces juridictions sont justement ceux qui impactent les autorisations d’urbanisme. Les délais dans lesquels ils doivent être intentés, faute d’être irrecevables, sont donc aménagés.


L’ordonnance 2020-306 du 25 mars 2020, relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire, pose trois principes que nous détaillerons par la suite:


  1. Institution d’une période "juridiquement protégée" du 12/03 au 24/06/2020 (durée de l'état d’urgence sanitaire + 1 mois) [Mise à jour] L'ordonnance du 7 mai a fixé la fin de cette période le 23 mai à minuit
  2. Seuls les délais expirant [Mise à jour: ou démarrant ]pendant cette période sont concernés
  3. Interruption des délais, qui repartent “à zéro” à l’issue de la période [Mise à jour: l'ordonnance du 15 avril supprime la remise à zéro]

1) Institution d’une période d’urgence du 12/03 jusqu’au 24/06/2020

L’article 1 de l’ordonnance 2020-306 fait référence à l’article 4 de la loi du 23 mars 2020, dite loi “d’habilitation”, qui encadre les pouvoirs donnés au Président de la République et au Gouvernement pour légiférer par ordonnances -sans débat préalable au Parlement- afin de faire face à l’épidémie de coronavirus Covid-19.


Cet article 4 déclare l’état d’urgence sanitaire pour une durée de deux mois à compter de l’entrée en vigueur de la loi. Dans son article 22, la loi a prévu son entrée en vigueur immédiate par dérogation à la règle de principe. L’état d’urgence sanitaire court donc du 23 mars 2020 au 24 mai 2020 à 0h. Attention, cette date de fin n’est pas fixe. En effet, l’état d’urgence sanitaire peut être prolongé par la loi ou abrégé par décret en conseil des ministres.


Mais l’ordonnance 2020-306 va plus loin: son article 1 définit une période "juridiquement protégée" qui démarre rétroactivement le 12/03/2020 et se termine un mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire. Cette période, que nous désignons dans le présent article “période d’urgence sanitaire” ou "période juridiquement protégée", court donc du 12/03/2020 au 24/06/2020 0h.


On ne peut que s’interroger sur la pertinence de ce mois de “battement” ajouté à la durée de l’état d’urgence sanitaire. Selon les commentaires que nous avons pu en lire, la raison de ce mois additionnel est à chercher dans le délai nécessaire aux juridictions et aux collectivités locales pour retrouver un fonctionnement normal suite au fort ralentissement -voire l’arrêt- de leurs activités du fait de l’urgence sanitaire liée au Covid-19 (télétravail, fermeture au public, impossibilité d’accès aux pièces non numérisées…) et l’accumulation prévisible de dossiers en instance de traitement.


MISE A JOUR du 17 avril 2020: l'ordonnance 2020-427 du 15 avril a supprimé le mois de "battement". 


2) Seuls les délais expirant pendant la période d’urgence sanitaire sont concernés

L’article 1 de l’ordonnance 2020-306 restreint le champ d’application de l’ordonnance aux seuls délais “qui ont expiré ou qui expirent” dans la période d’urgence sanitaire telle que définie ci-dessus.


Cette restriction permet ainsi paradoxalement, comme nous l’avons vu ci-dessus, aux autorisations qui seraient octroyées et affichées vers la fin de la période d’urgence sanitaire d’échapper à l'"interruption” des délais de recours institué par l’ordonnance 2020-306.


[Mise à jour du 26 avril 2020] Le délai de retrait n'est pas soumis à cette exception car, s'agissant d'une décision de l'administration, il est soumis à l'article 7 de l'ordonnance 2020-306 qui instaure une suspension ou un report selon les dates (voir descriptions ci-dessus). Cette suspension ou ce report du délai de délai de retrait n'est pas modifié par l'ordonnance "correctrice" du 15 avril (n°2020-427).


Cependant, l’effet rétroactif sur les délais expirant après le 12/03/2020 doit faire prendre en compte séparément chaque type de délai de recours, de déféré préfectoral ou de retrait pour déterminer quelles autorisations déjà accordées et affichées sont affectées. S’agissant du délai de recours des tiers, toutes les autorisations affichées depuis le 26/12/2019 sont concernées (2 mois de délai de recours + 15 jours francs de notification, comptés à rebours depuis le 12/03/2020). S’agissant du délai de retrait, toutes les autorisations octroyées depuis le 12/12/2019 sont concernées (3 mois de délai, comptés à rebours depuis le 12/03). 


MISE A JOUR du 17 avril 2020 et du 8 mai 2020: avec l'ordonnance 2020-427 du 15 avril le démarrage des délais qui devaient commencer à courir après le 12 mars est reporté à la fin de l'état d'urgence au 24/05 à 0h, sans le mois de battement supplémentaire.


3) Interruption des délais - remise à zéro à l’issue de la période

L’article 2 de l’ordonnance 2020-306 précise les modalités de calcul des nouveaux délais pour “tout (...) recours (...) prescrit par la loi ou le règlement à peine de (...) caducité, (... ou) irrecevabilité (...) et qui aurait dû être accompli pendant la période”. Cette formulation englobe donc bien le délai de notification de l’article R600-1, bien que cette notification ne doive pas être adressée à une juridiction administrative.


L’article 2 pose ensuite le principe d’une interruption au sens juridique, même s’il n’emploie pas cette terminologie précise. Il stipule en effet qu’un recours “sera réputé avoir été fait à temps” s’il intervient “dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir”. 


Dans le cas des recours, ce “délai légalement imparti pour agir” est celui stipulé dans les textes de loi ou réglementaires, dans sa totalité et sans prendre en compte la durée qui restait à courir au 12/03.


Cette interprétation dans le sens d’une “interruption” (et non d’une “suspension” qui a été évoquée par certains juristes) est confirmée par la circulaire publiée par le Conseil d’Etat le 26 mars qui résume l'impact des ordonnances n°2020-305 et n°2020-306 du 25 mars 2020 sur la procédure devant les juridictions administratives.

Circulaire du Conseil d'Etat précisant les modalités d'adaptation des délais de l'ordonnance 2020-306 pour les juridictions administratives

MISE A JOUR du 17 avril 2020: l'ordonnance 2020-427 du 15 avril institue désormais une suspension au lieu d'une interruption.


Les experts juridiques en droit public et droit de l’urbanisme interprètent l’ordonnance 2020-306 comme une “interruption” des délais de recours

Pour l’élaboration de cette analyse nous nous sommes appuyés sur les textes législatifs et réglementaires disponibles publiquement (sur Légifrance) ainsi que sur les avis d’experts parmi les directions juridiques de nos clients et la communauté des juristes en droit public et urbanisme très active sur les réseaux sociaux depuis la publication des ordonnances. Nous tenons à les remercier collectivement pour leurs contributions.

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crédits photos : Attestis / Pixabay / Geralt

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